ARCHITECTURE : des corbeaux différents

ARCHITECTURE : Observations et propositions sur les différents profils des corbeaux

Un corbeau n'est pas une pièce ornementale d'une salle funéraire ou divinatoire, mais une pierre qui ressort du mur et qui une fonction de soutien, généralement de charpente, de planchers, parfois d'escaliers. Généralement, cette pierre est ouvragée, mais ce n'est pas toujours le cas.

 A l'issue du premier relevé archéologique, on observe aux Aubelles trois types de corbeaux taillés, que nous aurons bientôt disponibles en photos. Ceux-ci s'ajoutent aux autres formes d'appuis des planchers et charpentes, qui se font également par ancrage direct dans le mur, ou en appui sur un mur inférieur plus épais.

 - Le premier type se trouve dans la chapelle, dans le mur sud, le mur long en face en rentrant.


On peut en observer 9, plus ou moins dégradés, espacés de 80 cm environ. On peut penser trouver leurs vis à vis sur le mur d'en face, dans la sur-épaisseur du mur, à moins que ceux-ci, trop dégradés, n'aient complètement disparu.
Il est caractérisé par une assise plus large que le corbeau lui-même, d'une largeur d'une quinzaine de cm de chaque côté.
  ____________
  l       l X X l        l
  l___lXXX l___.l <----- assise plus large
  ^     ^
   l      l-----------------
corbeau
   l----------------------- assise plus large

Il est en pierre blanche, sans doute calcaire. Il est taillé à flanc droits, son profil étant adouci par un tracé en courbe au niveau de l'angle proéminent inférieur. La surface d'appui est de niveau avec le dessus du corbeau.

               [      <----------- mur
 ______[__
l                  <----------- surface d'appui correspondant au dessus du corbeau
 \
   \               <----------- profil arrondi (et non de biais)
     \_____
              [

Sa fonction est manifestement de supporter les pièces maîtresses du plancher. Il reste à savoir si c'est en portant directement des solives traversantes, ou une poutre maîtresse courant le long du mur, elle même supportant les solives traversant la pièce dans sa largeur.
Cette forme présente sans un meilleur ancrage dans le mur, peut être pour mieux supporter une importante poussée strictement verticale, comme c'est le cas pour un plancher.

 - Le second type de corbeaux est observable en deux endroits différents, à l'extérieur de la chapelle. Le premier se trouve à droite de la porte de la chapelle, le second sur le mur côté greniers, à une hauteur de 1m. environ du sol actuel, à 3 m. environ de la façade de la chapelle, derrière un rosier.

     


Il est taillé dans une pierre aujourd'hui grise, à la surface granuleuse, faisant penser à de la pierre de Volvic, selon Laurent Lepresle. Les caractéristiques de cette pierre sont proches de celles dans lesquelles sont taillées les fenêtres du rez de chaussée de la chapelle, à droite de la porte. Peut être la même pierre blanche que pour les premiers que nous avons décrits, mais exposée, elle, au soleil, au vent, et aux intempéries.
Les proportions semblent assez équivalentes aux premiers décrits, mais leur forme diffère en plusieurs points. Le corbeau n'est pas stabilisé par une surface d'assise de part et d'autres : la largeur de la pierre correspond à la largeur du corbeau. Par ailleurs, la surface d'appui ne correspond pas au dessus de la pierre : on observe une butée de 2 cm environ de hauteur, au niveau du mur, ce qui traduit un profil supérieur à deux angles droits.

           [
           [___  <-------------  mur
_____[       <-------------  partie supérieure du corbeau, au dessus de la surface d'appui
L_  ^           <-------------  partie principale du corbeau avec rebord proéminent : surface d'appui
     l l_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ surface d'appui
     (              <------------- profil hyperbolique, sortant( et non de biais)
       (_____
           [

Il sort moins du mur que les premiers décrits. Son profil est caractérisé par une courbe hyperbolique, sortante, , arrondi vers l'extérieur, prolongée par un rebord, à angle droit. De face, on observe non pas un dessin carré mais plutôt rectangulaire. Les angles du bas disparaissent pour des biseaux
    ________
    l_______ l <------------ partie supérieure du corbeau, au dessus de la surface d'appui
    l .X.X. X.X. l <------------ rebord proéminent : surface d'appui
    l                 l <------------ corps du corbeau
    l                 l
.    \ ______/  <------------ biseau
    ^
     L _ _ _ _ _ _ _ _ _  _ _ biseau

Ces différences sont vraisemblablement de trois ordres.
Le premier, esthétique, peut impliquer que la pièce dans laquelle il donnait avait une plus grande importance, un plus grand prestige, que le bas de la chapelle. Cet élément, dnas la mesure où il ne s'agit pas d'un rajout, peut permettre de hiérarchiser le prestige des différents espaces, donc de se faire une idée des différents groupes de personnes pouvant s'y trouver, donc de dégrossir leur fonction (apparat, religieux, habitation, communs...).
Le second, mécanique, semble impliquer un travail différent. une moindre surface d'appui, peut être une moindre charge. Un renfort vertical, et non horizontal, ayant une fonction mécanique ? Un meilleur ancrage ? Dans quel plan ? Un butée qui protège le mur lui-même contre des à-coups du corps soutenu ?
Le troisième relève du positionnement, isolé, à des hauteurs ne correspondant pas à des plafonds ou des charpentes. Si celui près de la porte de la chapelle peut avoir été rajouté, l'ajustement du second, qui donne vers l'intérieur de l'ancien bâtiment, paraît normal par rapport au reste du mur (alignement, aplomb, maçonnerie). Il reste à savoir si le plan du mur est lui même d'origine ou sur-accolé à une face intérieure très dégradée...

 Le troisième type de corbeau se trouve sur l'extérieur du mur de la chapelle, côté grenier, à 1 m. du bas de la toîture actuelle.

 On en compte deux aujourd'hui, 4 ou 5 sur le croquis de Buhot de Kersers, avant l'incendie. Ils sont alignés horizontalement.
Leur positionnement à grande hauteur rend difficile une observation exacte.
Ils semblent être de la même pierre grise que les seconds observés.
Leur surface d'appui semble carrée.
Leur profil est caractérisé par une tablette carrée, à bords rectangulaires, soutenus par un renfort à courbe hyperbolique rentrante, avec un arrondi à la base

                  [
    ________[___
    l___________   <-------------- tablette, surface d'appui
       )
         )
           )                   <--------------- renfort, à courbe hyperbolique rentrante
            (_______  <--------------- arrondi vers le bas
                   [


Leur section, de face, présente les mêmes caractéristiques : tablette à section rectangulaire, base aux bords incurvés hyperboliquement vers l'intérieur, avec un arrondi basal. La partie ancrée dans le mur présente une section  apparemment carrée, pour le moins d'une surface supérieure à celle du soutien de la tablette.

          __________
          l_________l <------------ tablette, surface d'appui
          l   )     X     (   l
          l    )    X    (    l <------------ renfort, à courbe hyperbolique rentrante
          l     )   X   (     l
          l _   (_X_)  _ l <------------ arrondi vers le bas
            ^    ^    ^
             l     l_ _ l _ _ _ _ _ _ _  proéminence
             l _ _ _ _ l _ _ _ _ _ _ _ section carrée de la partie ancrée dans le mur.

Vu la hauteur de positionnement de cet alignement de corbeaux, il est fort vraisemblable qu'ils servaient à supporter la charpente de la toîture couvrant cette partie de l'habitation, où le plancher des combles.
La qualité de leur façon semble souligner un grand soucis d'esthétique, traduisant vraisemblablement le fait qu'ils étaient visibles dans une pièce d'apparat, ou du moins dans une pièce, un espace, où circulaient des personnes de haut rang. Il n'est donc pas impossible que cet espace soit dans le même volume que l'ouverture dont on voit un départ au bord gauche de la façade de la chapelle, ce qui aurait signifié une très grande hauteur de plafond.

© 2011 Gwenaël FAUCHER